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James Nachtwey et le photojournalisme : La perte de crédibilité pourrait être désastreuse

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Je ne sais pas si êtes au courant, mais plusieurs médias aux États-Unis ont partagé une information selon laquelle un individu se serait fait passer pour un photojournalisme. Voici un résumé de ce scandale journalistique et un peu plus loin dans mon texte, vous comprendrez pourquoi j’en ai fait un article.

Le faux photojournaliste

Un certain Eduardo Martins vivant en Australie a partager quelques-unes de ses photos, le montrant à bord d’une fourgonnette dans une zone de guerre indéterminée. Il a remis une histoire et des photos à VICE au sujet de la bataille de Peshmerga, mais deux autres correspondants brésiliens qui étaient là en même temps ont déclaré qu’ils n’avaient jamais rencontré ce photographe nouvellement célèbre – quelque chose qui est presque impossible compte tenu de la taille et de la communauté de conflits, que sont les photojournalistes.

Depuis lors, il s’est caché, après avoir raconté une histoire la plus folle du photojournalisme. Et si ce n’était pas de quelques erreurs commises par Martins, l’histoire étonnante de sa vie et de ses photographies, profiteraient probablement de son essor fulgurant.

Des publications plus petites telles que SouthFront à des publications prestigieuses comme The Wall Street Journal et Le Monde, ont été illustrés par ce que tout le monde pensait être le travail de Martins. Il a même été interviewé par RECOUNT magazine, racontant sa vie dans ces pays en conflit. Voici un extrait ce qu’il aurait vécu:

Une fois en Irak, photographiant un conflit, j’ai arrêté de prendre des photos pour aider un garçon qui a été touché par un molotov, et l’ai aidé à sortir de la zone de conflit. Dans des situations comme celles-ci, j’arrête d’être photographe et je redeviens un être humain. Je ne peux pas être impartial dans ces moments.

C’est une belle histoire n’est-ce pas ? Pourtant, comme je l’ai mentionné, tout est faux. Cet individu – que je nommerai pas – a publié sur son compte Instagram certaines de « ses photos », qui ont été également livrées à des agences photo de renom, dont NurPhoto, lesquelles ont été prises en réalité par l’américain Daniel C. Britt, qui vit en Turquie. Voici toute l’histoire en détail si vous désirez en savoir plus sur ce mythomane: cliquez ici.

James Nachtwey

C’est précisément ce que dénonce et craint James Nachtwey qui est lui, un véritable photographe de guerre et photojournaliste. Il a grandi dans le Massachusetts et est diplômé du collège Dartmouth, où il a étudié l’histoire de l’art et en sciences politiques. Il considère son travaille comme essentiel dans notre monde abreuvé d’informations de toutes sortes.

Il est considéré comme l’un des plus grands photojournalistes de notre époque. Il a couvert un grand nombre de conflits dans plusieurs pays, notamment en Afghanistan, au Kurdistan, Somalie, au Salvador, au Nicaragua, au Guatemala, au Liban, en Cisjordanie, en Indonésie, en Thaïlande, en Inde, au Sri Lanka, aux Philippines, au Soudan, au Rwanda et Afrique du Sud. Il est membre de la Royal Photographic Society et possède un doctorat honorifique en beaux-arts du Massachusetts College of Art.

Il a reçu de nombreux Prix, notamment, le Common Wealth Award, le Prix Martin Luther King, le Prix de citoyenneté mondiale Dr. Jean Mayer, le Prix Henry Luce, la Médaille d’or Robert Capa (cinq fois), le World Press Photo Award (deux fois), le prix International Center of Photography Infinity Award (trois fois), le Leica Award (deux fois), le Bayeaux Award for War Correspondants (deux fois) et le prix Alfred Eisenstaedt.

Ce qui distingue ce photojournaliste des autres, c’est qu’il ne recule devant rien pour prendre ses photos, réussissant ainsi des prises de vues très proches de l’action. Très souvent, il participe et aide ceux qu’il prend en photo, montrant l’aspect humaniste qui l’anime, qui pour lui, est plus qu’une doctrine, mais une façon de participer aux changements que nous devrions tous désirez.

Malheureusement, ce qu’il constate après avoir couvert tous ces conflits, est une dégradation et une perte de confiance des lecteurs, au profit de grands conglomérats qui ne se préoccupent pas de la vie et du bien-être des gens, mais des profits qu’ils génèrent à court terme. Sa vision, teinté d’un certain cynisme, est celle d’un monde en déperdition, qui n’a plus d’idéaux pour le guider. Il utilise la photo comme « arme anti-guerre » pour redonner à notre monde, un semblant d’humanité. Mais selon lui, il se passe quelque chose de très grave; la crédibilité des photojournalismes est remise en question.

Vous en avez un très bon exemple avec ce faux photojournaliste mythomane, qui était même prêt a perdre le peu d’acquis qu’il avait dans sa vie, au profit d’une éphémère et fausse renommé. Nachtwey n’est pas tendre avec ces imposteurs, car ils détruisent le peu de crédibilité qui reste à ces vrais photographes de guerre. Il s’est même déjà posé la question: »Le photojournalisme est-il en danger ? ».

Le photojournalisme en danger

Le photographe Clary Estes, est du même avis; nous assistons à une banalisation et une remise en question de la crédibilité de ces photographes, pourtant essentiel en ces temps de grands bouleversements. Il donne comme exemple Steve McCurry, dont plusieurs de ses photos ont été modifiées. Pour se justifier, il définissait son travail comme une narration visuelle. Il donne comme second exemple: Robert Capa et sa célèbre photo  » The Falling Soldier « . Capa prit en fait deux photos de ce soldat, et comme il nous explique:

Arriver à photographier le moment de la mort d’un soldat une fois; étonnant! La prendre en photo deux fois; cause extrême probable de manipulation. Quel est l’aspect le plus étonnant de cette manipulation ? Robert Capa est un membre fondateur de Magnum Photos, l’agence photo la plus prestigieuse au monde, comme McCurry (qui fait également partie de l’agence), et ces deux photojournalistes sont des intouchables. Pourtant sa phrase célèbre – « Si vos images ne sont pas assez bonnes, c’est que vous n’êtes pas assez proche » – continue à inspirer de nombreux photojournalistes.

En résumé, le métier de photojournaliste n’est plus ce qu’il était, et James Nachtwey le déplore, car ce qui en jeu, est la crédibilité de ces photographes.

La crédibilité remise en question

Dennis Dunleavy, photojournaliste et éducateur, partage lui aussi cet avis. Le photojournalisme joue un rôle important dans la société, en façonnant la façon dont nous comprenons les événements de notre monde. Le photojournalisme fournit une forme de vérité visuelle qui peut apporter une profondeur et un aperçu des nouvelles. Comme «les yeux du monde», le photojournalisme est une extension d’un système de représentation qui élargit la portée de notre vision, dépassant les opinions et les descriptions.

Toutefois, le photojournalisme peut également fausser le contexte et la réalité. De plus en plus, le photojournalisme, en tant que système de représentation, semble être subjugué par un changement vers un contenu moins controversé et moins offensant. Le photojournalisme, comme d’autres formes de communication, a été utilisé pour accroître les bénéfices. Les consommateurs d’informations visuelles restent, par une foi aveugle, engagés à croire que «la vision captée par un appareil photo ne se trompe jamais».

Au cœur de cette croyance réside l’hypothèse que les photojournalistes sont réfléchis, professionnels et éthiques et enregistrent la réalité. Je dirais que cette hypothèse, est en grande partie vraie. La plupart des photojournalistes sont des individus hautement moral et éthique qui croient dire la vérité, comme ils la perçoivent, avec un appareil photo. Cependant, lorsqu’une image dépasse le contrôle du photographe par la sélection, la taille, la légende et l’écriture de titre, ainsi que le placement sur une page, un contexte et un changement de sens peuvent se produire.

La naïveté au service des conglomérats journalistiques

Lorsqu’il a interrogé ses étudiants sur l’importance des photojournalistes, il s’est aperçu qu’ils étaient très naïfs. Ils affirmaient que des images significatives peuvent rendre le monde meilleur. Bien que cette évaluation soit naïve et idéaliste, cette conviction nuit à ce métier, car elle ne tient pas compte de la réalité des grands conglomérats journalistiques, dont le but véritable n’est pas d’informer, mais de manipuler l’opinion publique.

Depuis près d’une décennie, certains observateurs ont prédit la mort du photojournalisme, comme nous le connaissons. Peut-être que le photojournalisme est en train de mourir d’une manière ou du moins se réinventer, car jusqu’à une certaine mesure, le photojournalisme consiste à apprendre à s’adapter à de nombreuses choses, y compris, les pressions supplémentaires de travailler dans un environnement multimédia numérique et la réduction des effectifs des entreprises.

Bien que la technologie numérique semble contribuer à modifier la façon dont les gens « consomment » les images, cela ne tue pas le photojournalisme. Le véritable ennemi du journalisme, est la nature insidieuse de la cupidité des entreprises qui cherchent à transformer les nouvelles en or.

En résumé, James Nachtwey avait raison, nous sommes bien dans une période de l’Histoire où le métier de photojournalisme est en danger. Si vous désirez mieux connaître Nachtwey, voici une vidéo dans laquelle il parle de son métier et ce qu’il a expérimenté dans ces pays en guerre.

crédit photo : James Nachtwey

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Damien BERNAL

Je m’appelle Damien BERNAL et j’ai créé ce blog pour partager ma passion avec vous.  Sony avec sa gamme Alpha a créé un univers très riche et nous allons l’explorer ensemble. Les articles sont la pour répondre à vos questions.

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2 réponses

  1. La fillette et le vautour de Kevin Carter, Capa et bien d’autres ont offert leur réalité à un public encore plus naïf que nous. La manipulation ne date donc pas d’hier.

    Mais aujourd’hui, il existe des canaux de communications véhiculant une information non filtrée par les media classiques.
    Cet état de fait exaspère ceux qui y ont investi des fortunes afin d’assoir davantage leur pouvoir.

    On peut cracher, à juste titre sur ces media, mais ils ne sont que le bras, le cerveau est ailleurs.
    Le monde du photo-journalisme le sait bien. Les plus courageux sortiront de cette zone de confort au détriment de leurs privilèges.

    Sauver les grands media n’est plus la priorité du jour.
    Ils sont déjà, pour la plupart, dans un coma intellectuel profond.

    Assurer la neutralité du net, ne pas censurer une information alternative au courant mainstream, voilà l’enjeux.
    Le photo-journalisme devrait prendre en considération cet état de fait s’il ne veut pas mourir.