Le photographe William Eggleston, bien connu pour ses photos de rue très colorées et énigmatiques, nous explique comment vive avec la critique, sans remettre constamment en question notre vision et notre approche artistique.
La critique
Tout photographe influent a toujours été critiqué pour quelque raison que ce soit. Certains lui reprocheront de ne pas suivre les règles de la photographe, d’autres d’avoir eu la prétention d’essayer quelque chose de nouveau. Chaque fois que nous nous révoltons contre le statu quo imposé par une majorité endormie, nous sommes soumis à l’impitoyable épreuve des critiques.
Lorsque j’ai exposé la première fois au MOMA à New York en 1976, j’ai rencontré beaucoup de critiques qui affichaient sans gêne leur haine envers mon travail. Un critique d’art du New York Times avait intitulé son article : « L’exposition la plus détestée de l’année ». Lors d’une autre exposition, un autre critique a dit que mes photos étaient « totalement ennuyeuses et parfaitement banales. » Ironiquement, cette exposition portait précisément sur la banalité du quotidien des gens où j’habitais à cette époque.
Je ne me suis pas laissé abattre par ces critiques. Au contraire, cela m’a conforté dans l’idée que ce que je faisais, était probablement trop nouveau pour ces gens. Qu’ils s’attendaient à voir les mêmes photos que l’on voit trop souvent dans des expositions d’artistes, qui ne savent pas bouleverser les règles, et qui se plient passivement aux dictats du monde de la photographie.
Ce que j’ai appris au cours des années qui ont suivi, c’est qu’il ne faut pas craindre la critique. Je pense sincèrement que chaque fois que vous provoquez une réaction, aussi agressive soit-elle, cela signifie que vous faites quelque chose de bien et de différent. Pourquoi ? Si personne ne se soucie de votre travail, cela pourrait démontrer qu’il n’apporte rien de nouveau, qu’il ressemble à tout ce qui a déjà été fait. Mais si vos photos déclenchent une forte réaction émotionnelle, qu’elle soit positive ou négative, alors dites-vous que vous avez fait votre travail de photographe.
Il est impossible de plaire à tout le monde. Ce qui importe le plus, c’est que vous soyez satisfait de vos photographies. Si d’autres personnes s’intéressent et aiment ce que vous faites, c’est encore mieux, mais ce n’est pas une obligation. Ne faites pas l’erreur de chercher à plaire à tout prix, vous vous perdrez en tant qu’artiste dans les limbes infinis des critiques.
J’ai souvent été critiqué sur internet dans le passé. Cela m’a permis de développer mon caractère, et surtout de me rendre compte que bien souvent, les critiques les plus virulentes viennent de gens jaloux et mal dans leur peau. Quoi que vous fassiez, vous ne les contenterez jamais. Ils prennent plaisir à détruire le travail des autres. En y pensant bien, j’éprouve de la pitié pour ces gens. Leur but n’est pas de faire connaître votre travail, mais simplement de détruire, pour le simple plaisir de vous écraser.
Dites-vous qu’il y aura toujours des réactions lorsque vous présenterez votre travail : soit vous serez jugé négativement ou positivement, soit vous serez ignoré. C’est à vous d’apprendre à vivre avec la critique. Personnellement, je préfère être jugé que d’être ignoré. Les gens qui vous critiquent ne se rendre pas compte qu’en réalité ce qu’ils font, ce n’est pas de vous détruire, par leurs agissements ils démontrent en réalité que vous les avez perturbé. Soyez-en fier !
Au sujet de l’auteur
William Eggleston est un photographe américain. Alors qu’à ses débuts il travaillait en noir et blanc, il a commencé en 1965 et 1966 à expérimenter la pellicule couleur, qui devint finalement son principal moyen d’expression à la fin des années 1960. Le développement artistique d’Eggleston en tant que photographe semble s’isoler des autres artistes. Il a su suivre son intuition, sans se laisser abattre par les critiques.