Pour certaines photographes, prendre en photo un sujet ou une scène, peu importe ce quelle est, est une véritable thérapie. Cela leur permet de se reconnecter avec leur passion, de retrouver le plaisir de créer, de reprendre contacte avec ce qu’ils aiment le plus. Le photographe Ming Thien a créé une expression pour décrire ce besoin de créer tout en vous libérant des entraves qui limitent votre imagination. Il appelle cela la « Shutter Therapy ». Mais qu’est-ce que cela veut dire exactement ? Comment cela peut faire d’un artiste de l’image un meilleur photographe ? Voici ses explications.
La « Shutter Therapy »
La « Shutter Therapy » est une phrase que j’ai créée il y a plusieurs années et que j’utilise souvent dans mes articles. Je ne me souviens pas de l’avoir très bien expliqué, et, étrangement, cette expression est largement utilisée par de nombreux amis et photographes. Voici plus précisément en quoi consiste cette thérapie et comment je l’ai découverte.
Il y a plusieurs années, lorsque je me trouvais Malaisie, je suis me suis mit à faire de l’introspection – comme je le fais souvent – afin de définir ce que cela signifiait, à quel moment j’ai commencé l’utiliser, ses origines et pourquoi j’avais mis côte à côte ces mots; « Shutter et Therapy ». Cette publication résulte de cette introspection et de ma tentative de répondre à ces questions.
Au début de 2008, j’ai acheté mon premier appareil photo, un Olympus E-410 et, à certains égards, cela a marqué ma profonde plongée dans le monde de la photographie. Presque un an plus tard, mon père est décédé et je me suis retrouvé à Kuching, dans ma ville natale, me sentant plutôt déprimé. Je devais sortir de la maison et trouver un moyen de faire face à mes émotions qui me rendaient la vie si misérable. Je pensais que la photographie était une bonne option puisqu’elle nécessitait suffisamment de concentration et d’effort mental pour occuper mon esprit – et cela a fonctionné. Lorsque j’ai débuté à prendre des photos, je me suis senti libre. Mentalement, je me sentais délivré par mes émotions négatives. Je ressentais une impression de satisfaction lorsque je prenais une photo que j’aimais.
Ce puits d’émotions positives était extrêmement puissant et augmentait au fur et à mesure que je déambulais avec mon appareil photo, recherchant des sujets intéressants. Après cette première expérience, alors que je me trouvais chez moi en regardant mes photographies, il m’a semblé que cette « séance de photographie », courte et improvisée, était «thérapeutique». En d’autres termes, je venais de vivre ma première séance de « Shutter Therapy ». La qualité thérapeutique de cette séance était malheureusement limitée dans le temps et j’ai rapidement retrouvé l’envie de faire une autre séance à chaque week-end ou lorsque j’avais le temps. Puis, je me suis rendu compte que la photographie était devenue une obsession, comme une thérapie à mes motions négatives.
Une découverte accidentelle
L’association des mots « Shutter Therapy » avec la photographie de rue a été accidentelle. Au début de 2009, je me suis retrouvé profondément immergé dans la photographie et j’ai essayé tous les styles que m’offrait la photographie – du portrait en studio aux défilés de mode et à celui qui me semblait le plus accessible ; la macrophotographie. Cela me permettait de me concentrer sur les insectes, donc un sujet qui me faisait oublier mes émotions négatives.
Après deux ans de macrophotographie, je me suis rendu compte que même si j’avais développé une forte compréhension technique de la photographie, je n’avais pas développé mon sens artistique. Bien sûr, mes images étaient plus nettes, bien éclairées avec un BDB très précise, mais ma composition était médiocre et mes images ne racontaient rien. Le problème n’était plus « comment prendre des photos », mais « comment faire une photo ». En réalisant que j’avais besoin d’améliorer mes compétences et de repousser mes limites artistiques, j’ai pris une pause avec les insectes et j’ai commencé à m’intéresser à un genre entièrement différent – la photographie de rue.
J’ai alors commencé à utiliser plus souvent la phrase « Shutter Therapy » afin de décrire plus exactement mes séances de photographie de rue, pour, au final, trouver cette expression qui décrivait le mieux ce que je faisais. Maintenant, lorsque j’invite des amis à participer à une séance de « Shutter Therapy », cela signifie généralement prendre des photos pour le plaisir. Donc, pour revenir à la question initiale: qu’est-ce que la »Shutter Therapy » ?
Comment se manifeste-t-elle ?
À mon avis, la « Shutter Therapy » se produit lorsque vous sortez avec un boîtier et que vous vous amusez à créer des photos. Le mot-clé ici est « amusé ». Pour que l’expérience soit thérapeutique ou cathartique, vous devez savoir vous amuser en prenant vos photos. Quand je sors le week-end en me livrant à une « Shutter Therapy », je prends en photo ce que j’aime et les sujets qui attirent mon attention. Cette liberté de prendre en photo ce que vous aimez est une expérience très importante et constitue la base de la « Shutter Therapy ».
Il n’y a pas de règles strictes, même les restrictions généralement acceptées de la photographie de rue sont supprimées. La « Shutter Therapy » peut être aussi courte qu’une heure ou durer toute la journée et ne se limite pas au week-end. Elle peut se faire solitairement ou avec un groupe d’amis, pourvu que tout le monde soit prêt à pendre des photos et à s’amuser. Personnellement, je n’aime pas avoir trop de gens lors d’une de ces séances thérapeutiques, car elle devient un grand rassemblement où il y a plus de conversations que d’action.
Le type d’équipement utilisé n’est pas important, un iPhone peut tout aussi être un bon outil qu’un appareil haut de gamme, tant que vous faites des images avec lesquelles vous vous vous reconnectez à l’aspect créatif dont vous êtres doté. Personnellement, je préfère les petits appareils photo. Mais rappelez-vous que vous devez demeurer fidèle à vos préférences et objectifs.
Ses avantages
- C’est un plaisir : L’anticipation de partir le matin d’un week-end, de sortir et de photographier. C’est une excitation difficile à expliquer pour moi, mais je suis bien conscient et j’attends avec impatience que ce moment arrive.
- Cela nous permet d’aiguiser notre sens de l’observation : La compréhension et la maîtrise des techniques et de l’équipement nécessitent un exercice constant. Cela permet de conserver ses réflexes de photographe et la mémoire musculaire, sans oublier un sens du timing et une connaissance de votre équipement. La photographie ressemble beaucoup aux sports (tout ce qui nécessite une coordination œil-main), plus vous pratiquez, plus vous êtes efficaces. Bien que je puisse contrôler les réglages de l’appareil photo et le triangle d’exposition de base de la vitesse de l’obturateur, de l’ouverture et des contrôles ISO avec facilité, je deviens moins efficace si je ne les utilise pas pendant une longue période de temps. Je n’ai pas l’intention de passer du temps à réapprendre ce que je sais déjà – je veux juste continuer à m’améliorer.
- Cela améliore vos photographies : Comme la plupart des disciplines, l’amélioration de votre production photographique ne se produira pas du jour au lendemain. Il faut de la patience, de la sueur et des efforts importants. Le moyen le plus efficace de s’améliorer, c’est de prendre des photos, encore et encore. Il existe des ateliers, des tutoriels en ligne et des guides, des livres écrits par des photographes professionnels, vous pouvez même avoir un excellent mentor. Mais vous ne pourrez pas profiter que de tous ces conseils en sortant de temps en temps à prendre des photos.
- Cela améliore votre productivité : Je passe généralement moins d’une demi-journée (la première moitié habituellement) pour à faire de la « Shutter Therapy », et je suis fini par le déjeuner. Cela le laisse le reste de la journée pour rencontrer des amis, faire des courses, regarder un film ou simplement lire calmement dans un resto. La « Shutter Therapy » est un moment fort pour moi, car elle me permet de planifier mes activités que je ferai durant le week-end. Même après toutes ces années, je planifie mes séances pour pouvoir répondre à mes engagements. La « Shutter Therapy » est une façon d’améliorer sa productivité photographique, car elle vous oblige à planifier votre journée. Cette forme de thérapie est devenue essentielle dans ma vie. En la pratiquant, j’ai appris à avoir une discipline de vie afin de pouvoir à la fois réponde à mes engagements professionnels, mais oublier de m’améliorer en tant que photographe
- C’est gratuit : En supposant que vous disposez déjà d’un appareil photo et d’un objectif (l’objectif du kit peut suffire), il n’y a pas de frais. Vous pouvez simplement saisir votre équipement et vous livrez à une séance de « Shutter Therapy » à tout moment !
Conclusion
J’espère que cela vous aidera à clarifier le sens de l’expression « Shutter Therapy ». Au fil des années, c’est devenu une partie intégrante de mon identité en tant que photographe. Alors que d’autres photographes, préfèrent et excellent à l’écriture sur des techniques spécifiques de la photographie, mon approche est plus pragmatique et moins philosophique. Je ne prétends pas être un expert en photographie, et je ne veux pas avoir une longue liste d’accolades et de récompenses comme Magnum Photos ou Nat Geo, mais j’ai réussi à faire une chose mieux que quiconque; à m’amuser tout en progressant. Chaque séance de « Shutter Therapy » est une occasion de progresser tout en s’amusant.
Cela ne semblera peut-être pas sérieux pour certains photographes, mais après avoir pratiqué depuis des années la « Shutter Therapy », je peux vous affirmer que cette technique fonctionne. Je ne suis peut-être pas un photographe mondialement célèbre, mais je serais heureux si les gens connaissaient et adoptaient la « Shutter Therapy ». C’est une expérience que vous devriez essayez; vous en deviendrez rapidement accro !
Pour les autres, qui préfèrent les anciennes méthodes pour progresser, il est dommage qu’ils n’aient pas un esprit plus ouvert, car bien que ces techniques fonctionnent, elles n’égaleront jamais le plaisir et les qualités que peut vous procurez la « Shutter Therapy ». Cette technique est tellement simple, que plusieurs débutants croient qu’il faut passer de longues heures à apprendre toutes sortes de techniques pour progresser. La « Shutter Therapy » est non seulement une façon amusante de progresser, mais elle ne coûte rien et elle permet à votre créativité de prendre son envol sans effort !
Au sujet de l’auteur
Ming Thein est un photographe professionnel qui est consultant pour Zeiss et Hasseblad. Vous pouvez découvrir son travail ou communiquer avec lui, en visitant sa page Facebook.